Le terme Ħashmal [חַשְׁמַל] est un apax qui apparaît uniquement dans le Livre d’Ézéchiel : « Je regardai : il vint du nord un souffle de tempête, une grosse nuée et une gerbe de feu, qui répandait une clarté tout autour. En son milieu, comme l’œil du Ħashmal au milieu d’un feu. » (Ézéchiel 1:4). Il existe nombre d’interprétations ésotériques sur ce mot mystérieux, qui signifie simplement « électricité » en hébreu moderne. Le texte nous indique qu’Ézéchiel contemple un enveloppement de puissantes énergies. Le dernier enveloppement au milieu d’un feu est celui du Ħashmal. L’œil du Ħashmal serait alors comme l’œil du cyclone. Un endroit protégé des effets des tempêtes. Un temps d’accalmie, une zone clémente siégeant en général au centre de la circulation cyclonique.
L’idée de vêtement associée au Ħashmal [חַשְׁמַל] peut s’entendre dans sa guimatria 378 qui est aussi celle de « malboush » [מַּלְבּוּשׁ], le vêtement. Ces deux termes partagent la bilitère « mal » [מַל] qui « remplit par la parole ». C’est pourquoi les sages ont entendu dans Ħash-mal [חַשְׁ-מַל] « murmure parlant ». Ainsi, malboush sera « mal-boush », « enveloppe la honte », mais cette enveloppe, ce vêtement, dit que la honte se trouve à l’intérieur. Ainsi, un vêtement est hébraïquement un "cache la honte", disons un "protecteur de pudeur".
C’est pourquoi, parmi les différentes approches dans la tradition mystique, le Ħashmal est aussi considéré comme un vêtement protecteur, il est nommé Maguén haregashoth [מָגֵן הַרְגָּשׁוֹת] (« Bouclier des émotions »), ou encore Malboush haregashoth [מַּלְבּוּשׁ הַרְגָּשׁוֹת] (« Vêtement des émotions »). Ces appellations soulèvent un voile sur un principe fondamental de la conscience humaine : une fois l'analyse d'une situation effectuée, ou une compréhension atteinte, il n'est pas nécessaire de revisiter sans cesse la totalité du raisonnement à chaque évocation du sujet.
Prenons l'exemple d'une personne méditant sur les méfaits du tabagisme. Une fois l'analyse conclue, et la dangereuse nocivité des cigarettes admise, il est inutile de remâcher le raisonnement à chaque vue d'un fumeur ou à chaque offre d'une cigarette. Toutefois, sans réitérer cette réflexion, les émotions peuvent s'embraser. Sans revivre l'entièreté du processus logique, l'individu peut s'enflammer d'indignation. Il se peut qu'il ne se souvienne plus des détails de son analyse, ni qu'il soit capable d'expliciter les raisons de sa répulsion, mais ses émotions, elles, s'éveillent dans un tumulte de dégoût et d'indignation. Ceci est l'œuvre du Ħashmal.
Ce phénomène ne se limite pas à l'individu mais se déploie également à l'échelle nationale, voire transgénérationnelle. Ainsi, une génération peut analyser un sujet et en tirer des conclusions que les générations suivantes adopteront, guidées par le Ħashmal hérité. Prenons l'exemple de la théorie de l'évolution : des esprits de jadis, ayant scruté les données disponibles, conclurent à une ascendance simienne de l'homme. Aujourd'hui, beaucoup adhèrent à cette idée non par analyse personnelle mais par conviction héritée, prêts à défendre cette croyance avec véhémence, sans pour autant pouvoir en expliciter la véracité, guidés uniquement par la confiance aveugle dans le verdict de la Science.
De même pour les religions : des millions de personnes en embrassent la foi sans examen préalable de leurs vérités, animés de passions ardentes, non issues de leur propre quête intellectuelle mais des conclusions de leurs prédécesseurs. Ils acceptent ces croyances comme vérités absolues, sans s'interroger sur leur fondement ou leur absurdité éventuelle. Ceci aussi est un Ħashmal, mais à une échelle multigénérationnelle ou nationale.
Comment donc le Ħashmal peut-il perdurer, même détaché de sa source ? Cela est dû à sa racine, ancrée dans le moi essentiel, bien au-delà des simples analogies. La source de l'allégorie est, en réalité, supérieure à l'analogie elle-même, capable de la contenir précisément parce qu'elle est d'un ordre plus élevé. Telles les lettres capables d'englober les concepts, leur origine transcende ces derniers, résidant dans l'essence même. Les lettres ne sont alors que des « vêtements » séparés, contenant et révélant les concepts. De la même manière, la source originelle du Ħashmal se trouve dans l'Essence même, lui permettant de subsister, vibrant de vie, même séparé de la lumière de l'intellect.
Ainsi, la sagesse du Ħashmal nous enseigne la puissance des émotions comme gardiennes de nos convictions les plus profondes, capables de perdurer au-delà du raisonnement, ancrées dans l'essence même de notre être.
La véritable compréhension ne se limite pas à l'intellect, mais réside dans l'écoute attentive du Soi, là où les racines du Ħashmal s'entremêlent avec la sagesse et la conscience.
Haut du formulaire
Ajouter un commentaire